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007006ar
Les Cheikhs mourides itinérants et l’espace de la ziyâra à Marseille
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Le mouridisme a été fondé par Cheikh Ahmadou Bamba au Sénégal à la fin du XIXe siècle. Ce mouvement religieux contemporain basé sur la mystique musulmane, né dans une société en crise aux prises avec l’administration coloniale française, a suscité tout au long du siècle l’intérêt des chercheurs. Cet article propose de saisir la logique des transformations à l’oeuvre dans l’univers religieux mouride contemporain entre la ville sainte de Touba et une des villes de migration, Marseille, à partir de l’ethnographie de la visite d’un cheikh à Marseille. Cet islam dans la migration articule le local et le transnational, l’ancrage et la mobilité, et ces acteurs religieux ont la capacité de pouvoir tout construire entre deux mondes. Cet « entre-deux » n’est ni vide ni virtuel, et l’étude de ce mouvement religieux dans la migration permet de le montrer et de le mesurer. La migration fait naître de nouveaux objets, une nouvelle société, et le religieux est un outil pertinent de compréhension de ces processus migratoires ; inversement, l’analyse de ces processus éclaire les transformations religieuses à l’oeuvre.
007007ar
L’île de corse face au droit français
L’opposition culturelle en question
Le champ politique en Corse semble irrémédiablement être celui du clientélisme et du népotisme : l’île, société segmentaire, engendre une représentation de l’organisation sociale qui légitimise ce type de pratiques, matérialisée au cours des siècles sous la forme du clanisme. Cette accréditation culturelle du clientélisme soulève tout particulièrement le problème de l’établissement de l’État de droit. Comment en effet instaurer une structure légale-rationnelle dans une société qui développe des valeurs qui lui sont opposées? L’analyse diachronique s’avère apporter des éclaircissements nouveaux à cette obscure et ambiguë situation insulaire. De fait, comme le dévoile l’histoire de l’île, la culture corse n’est pas opposée aux notions de démocratie et d’état de droit ; elle est même fondamentalement ancrée sur le droit par le biais de l’honneur, droit de chacun à être un être social à part entière. Face à cette autre conception des rapports sociaux, l’efficacité de cette panacée que serait la structuration weberienne moderne du pouvoir apparaît une fois de plus mise à mal...
007008ar
De l’anthropologie de la nation et du nationalisme
Limites et perspectives du débat en France
L’auteur note que les études autour des thèmes de la nation et du nationalisme n’ont pas connu en France une grande faveur malgré les intentions initiales fortes mais non abouties des fondateurs de la sociologie et l’anthropologie, Mauss et Durkheim. C’est au cours de ces deux dernières décennies que l’intérêt des sciences sociales s’est affirmé, à la faveur des interrogations traversant la société française. L’auteur souhaite le développement d’une anthropologie de la nation et de son excroissance idéologique, le nationalisme, afin de comprendre les modalités de construction de chaque expérience nationale et les recompositions qui peuvent s’opérer aujourd’hui sous l’effet de régionalismes nouveaux, de nationalismes « périphériques », ou du processus de l’intégration européenne.
007047ar
Lire la tradition orale, écrire l’histoire crie
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Dans un précédent article, auquel celui-ci fait suite, l’auteure avait posé la question suivante : les historiens non autochtones possèdent-ils les outils linguistiques et analytiques propres à interpréter les récits relevant de la tradition et de l’histoire orales, de manière à en conserver l’intégrité et la signification culturelle? L’article concluait que non. Ici, l’attention se porte sur ce qu’il est possible de sauvegarder de ces récits oraux pour introduire dans notre rédaction euro-dominée de l’histoire les conceptions et la compréhension qu’en ont les Autochtones. À partir de la fin des années soixante, sous les auspices de programmes muséaux, des anthropologues se sont rendus sur le terrain à l’est de la baie James et ont produit d’imposants rapports, qui ne comptent pas seulement des entrevues, mais aussi des traductions de récits oraux sur la tradition et l’histoire datant d’une époque antérieure à celle de l’entrée des Cris dans la société industrielle. Cet article analyse ces recueils pour offrir des exemples de sujets qui y sont abordés et montrer comment l’interviewer a pu en déterminer l’orientation. L’auteure maintient qu’une telle reproduction des récits oraux les arrache à leur contexte culturel, mais la matière qu’il est possible d’en tirer procure une compréhension vitale des activités et de la perspective qu’avaient les Cris à une époque aujourd’hui révolue ; cette compréhension est aussi essentielle à l’écriture de l’histoire du vingtième siècle.
007048ar
Les toponymes inuit, mémoire du territoire
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La mémoire des Inuit est ici appréhendée dans sa dimension géographique. L’étude se concentre sur les Inuinnait (Eskimo du Cuivre, Arctique occidental canadien). L’approche analyse leur système toponymique, recueilli par l’auteur en 1991-1992, et ses relations avec les récits de leur tradition orale collectés à trois reprises au cours du XXe siècle : en 1914-1916, 1923-1924 et 1958. La relation étroite entre l’espace et le temps est mise en évidence, la mémoire des Inuinnait articulant étroitement les lieux et les événements. Les références territoriales des récits couvrent l’ensemble du territoire nommé, mais la distribution spatiale de ces histoires se révèle aléatoire. La dimension spatiale apparaît comme constitutive de larges pans de la mémoire Inuit. Reprenant le concept de « géosymboles » développé par le géographe Joël Bonnemaison, on entreprend ensuite d’identifier les lieux du territoire des Inuinnait qui pourraient être qualifiés comme tels. L’identification conduite par le biais des analyses du chercheur est validée par les initiatives locales de mise en valeur du patrimoine Inuinnait, qui privilégient les lieux « géosymboles ».
007049ar
Kiviuq : une épopée en devenir?1
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Dans un article stimulant, Roberte Hamayon explorait les liens entre tradition chamanique et tradition épique chez les Bouriates de Sibérie. Dans le présent article, j’examine les dimensions chamanique et épique des récits inuit, et en particulier de l’illustre unikaaqtuaq de Kiviuq. Les récits qui mettent en scène Kiviuq présentent tous les traits d’une épopée émergente centrée sur un héros chamanique. L’article porte une attention particulière à la dialectique complexe qui existe entre le comportement social et non social du héros. La position de Kiviuq paraît ambiguë, puisque ses aventures peuvent se dénouer aussi bien sur son aliénation complète de la société que sur son retour à ses femmes. Il ne met pas ses aptitudes chamaniques au service de la communauté mais à celui de sa survie lorsqu’il rencontre de dangereux êtres non humains. Ainsi Kiviuq n’est-il pas un héros de service mais un héros de la survie.
007050ar
Écrire pour prendre la parole
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L’auteur examine les conditions d’émergence d’une conscience historique collective chez les Inuit du Nord canadien. Le « réchauffement » de ces sociétés que cristallise aujourd’hui l’invention du Nunavut — et avec elle une myriade de publications dans le domaine de « l’histoire orale » — découle davantage d’une stratégie de revendication que de l’avènement réel d’un nouvel et unique régime d’historicité. Lié aux effets de la sédentarisation, de la scolarisation et de l’adoption de l’écriture, ce réchauffement risque toutefois de s’avérer lourd de conséquences pour les futures générations. En suivant à grands traits la perspective des aînés, soit les outils et les catégories culturelles qu’ils utilisent pour traiter de leur passé, la dernière partie fait ressortir leur préférence pour une mémoire fragmentée, autobiographique et relationnelle fondée sur l’oralité. Bien que les jeunes partagent encore de nombreux points communs avec leurs aînés, l’époque contemporaine apparaît comme une période de transition marquée par la co-présence de plusieurs régimes d’historicité.
007051ar
Ce que précise la langue inuit au sujet de la remémoration
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Je propose d’analyser l’un des aspects d’un nouveau « genre » de l’oralité inuit, en m’appuyant sur la série Innarnik apiqsuqattarniq/Interviewing Elders produite depuis 1999 au sein du Language and Culture Program du Nunavut Arctic College à Iqaluit. S’agissant d’une mémoire en action, sollicitée dans un contexte institutionnel pour sauvegarder le contenu du savoir, je m’attacherai, pour mieux comprendre quelques aspects de ce mode de transmission culturelle, à des formes linguistiques significatives appartenant au champ sémantique de la mémoire. Je m’appuierai sur le lexique pour mieux saisir de quelle manière sont désignées, en inuktitut, les opérations générales liées à la mémoire (la conservation, la fonction de rappel, l’oubli, la réactivation) et tenterai de répondre aux questions suivantes : dans quelle mesure la terminologie est-elle susceptible de fournir des indices sur l’origine, le degré de rétention et de fiabilité des données mémorisées? De quels moyens expressifs dispose le locuteur pour se situer en tant que sujet? Pour développer mon propos, je tiendrai compte de l’hypothèse qui veut que la conceptualisation soit tout autant liée à des contraintes logiques universelles qu’à des contraintes culturelles. Nous verrons comment celles-ci s’expriment dans le contexte de l’actuelle transmission des savoirs.
007052ar
De l’ethnohistoire et l’histoire orale à la mémoire sociale chez les Inuits du Nunavut
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Vers où s’orientent, en ce début de nouveau siècle, les recherches ethnohistoriques au Nunavut? Une voie d’avenir, selon certains anthropologues, devrait être la combinaison des données d’archives et archéologiques avec l’abondante ethnographie recueillie dans cette aire culturelle depuis des décennies, une approche qui correspond bien à un paradigme de la recherche ethnohistorique en Amérique du Nord. Il importe aussi selon nous de prendre en compte d’autres approches dans ce domaine, dont l’histoire orale. Notre propos consiste à faire un survol des dynamiques principales et des productions marquantes caractéristiques de cette approche au Nunavut. Il y a là un courant à la fois interne et externe en croissance qui est appelé à faire évoluer les recherches moins vers l’ethnohistoire que l’étude de la mémoire sociale des Inuits.
007053ar
Les éleveurs de rennes contemporains de la péninsule de Seward
null
Cet article présente des observations sur les éleveurs de rennes de la péninsule Seward, au nord-ouest de l’Alaska. Des entrevues avec les éleveurs offrent des données et des perspectives sur l’élevage d’aujourd’hui dans le contexte du métier d’éleveur qui leur a été transmis. L’auteur découpe l’histoire de la gestion des troupeaux dans la péninsule pour offrir un cadre de référence aux propos des éleveurs. Ces entrevues aident à comprendre comment les éleveurs conçoivent la présente crise de l’élevage et nous offrent des pistes pour saisir comment l’élevage du renne peut continuer à être pour eux un moyen d’existence important à l’avenir.
007056ar
Apposer un symbole
null
Cet article fait le point sur la dimension totémique des symboles utilisés comme signatures par les Amérindiens du Nord-Est lors des traités avec les Européens. La théorie du totémisme est alors abordée, en particulier les analyses de Lévi-Strauss et de Testart. Si celles-ci semblent antagoniques, une conciliation est cependant proposée selon l’objectif poursuivi : un regard ethnographique favorisera l’analyse classificatoire du totémisme (Lévi-Strauss) tandis qu’une étude comparative des différentes pratiques des sociétés claniques vis-à-vis de la nature intégrera les formes sociales et apparemment individuelles de rapport à la nature (Testart). Cependant, ni l’une ni l’autre de ces approches ne conçoivent le symbole comme un signifiant qui, en garantissant la parole du signataire grâce au lien établi dans l’imaginaire collectif entre le symbole et la Loi qui donne son identité sociale au groupe, permet au discours d’alliance d’opérer.
007057ar
Les rites de la médecine traditionnelle bambara et le traitement de la « folie » jinèbana
null
Jinèbana, c’est une forme de « folie » identifiée par les guérisseurs bambara ; cela veut dire littéralement en langue bamanan : la maladie donnée par un jinè, un esprit. La médecine traditionnelle bambara reconnaît au moins trois autres variétés de « folie », mais entre toutes, c’est jinèbana qui suscite le plus d’appréhensions. À travers le cas d’un jeune bambara de 19 ans, cet article vise à décrire la trajectoire suivie par des guérisseurs traditionnels dans le traitement du jinèbana et à montrer comment cette trajectoire construit un espace clinique qui se structure selon une logique d’articulation et de continuité entre des systèmes de signes, de sens et d’action.
007444ar
Violence structurelle, mondialisation et tuberculose multirésistante
null
Plus de cinquante ans après l’introduction de la chimiothérapie comme traitement de la tuberculose, deux millions de personnes meurent de cette maladie tous les ans et 8,4 millions de nouveaux cas sont rapportés ; la tuberculose, en incluant ses formes multirésistantes, demeure parmi les maladies infectieuses guérissables celle qui fait le plus de victimes. Pourquoi les médi-caments qui permettraient d’arrêter ou de ralentir ces épidémies ne sont-ils pas disponibles là où on a le plus besoin? Pour répondre à cette question, nous explorons l’expérience de vie d’une famille haïtienne ainsi que les contextes sociaux dans lesquels les malades s’infectent, tombent malades et rencontrent toute une série d’aventures thérapeutiques qui mènent à plus de compli-cations, à une transmission croissante à d’autres personnes et, trop souvent, à la mort. Nous analysons aussi comment ces trajectoires sont le résultat de la violence structurelle et des inégalités sociales renforcées par la mondialisation.
007445ar
Les antirétroviraux en Afrique
De la culture dans une économie mondialisée
En Afrique, le traitement du sida par les antirétroviraux est soumis en premier lieu à des enjeux économiques qui réservent l’accès aux médicaments à une infime minorité de personnes. Quels sont les effets culturels de la disponibilité de ces traitements? Les antirétroviraux ne font pas seulement l’objet d’une « indigénisation » décrite à propos d’autres médicaments ; ils sont soumis à une expérience des patients qui, dépassant les limites de l’observance, conduit ces derniers à modifier leurs relations sociales ; ils constituent des révélateurs de « politiques de la vie » antagonistes du global au local en suscitant des catégorisations dans l’accès aux médicaments ; ils polarisent le système médical et conduisent à redéfinir les légitimités notamment aux articulations entre secteurs biomédical professionnel et secteurs traditionnel et populaire. L’impact de ces traitements en termes de modifications des représentations, des pratiques et des rapports sociaux, dépasse largement le secteur biomédical, car ils suscitent la production de médicaments néo-traditionnels dont la légitimité est construite à partir d’emprunts à la biomédecine, sur les terrains laissés vacants par celle-ci dans le champ de l’identité et de l’accessibilité, dans un processus favorisé par la globalisation.
007446ar
Le médicament aux frontières des savoirs humanitaires et autochtones
null
L’article pose un regard sur le médicament aux frontières des savoirs humanitaires et autochtones alors que se créent des liens et des discontinuités entre le local et le global. Tiré d’une ethnographie multi-sites réalisée au sein d’un projet de Médecins Sans Frontières auprès de populations autochtones de l’Amazonie brésilienne, nous démontrons comment les formes de savoirs observées dans des villages autochtones du Médio Solimões peuvent s’articuler, ou non, au contexte plus large de la médecine humanitaire. Le médicament pharmaceutique et les plantes médicinales constituent les objets iconiques respectifs du savoir biomédical et des savoirs thérapeutiques autochtones permettant une lecture des relations de savoir-pouvoir qui entourent leur rencontre pendant qu’ils circulent sur une trajectoire humanitaire.
007447ar
« Toupaille », kits MST et remèdes du « mal d’enfants » chez les Gouro de Zuénoula (Côte-d’Ivoire)
null
En prenant l’exemple de l’évolution sur une vingtaine d’années des traitements de maladies spécifiquement féminines, majoritairement diagnostiquées MST (maladies sexuellement transmises), chez les Gouro de Côte-d’Ivoire, nous avons analysé, avec les outils de l’anthropologie du médicament, les remaniements apportés par l’introduction de nouveaux recours thérapeutiques et l’apparition d’une nouvelle maladie (le sida), tant au niveau de la pharmacocénose que de la pathocénose locales. Dans le système de soins de santé actuel de la Côte-d’Ivoire coexistent des remèdes traditionnels, des médicaments, licites ou non, et les kits de produits génériques délivrés par les dispensaires de santé publique (pour le traitement des MST). L’introduction de ces nouveaux recours s’est produit dans le contexte de bouleversements économiques et sociaux qui, allégeant les contraintes pesant sur certains rôles de la femme dans la société gouro, ont affaibli l’étiologie sociale des maladies étudiées. Les remèdes se trouvent alors mis en concurrence avec les thérapeutiques exogènes proposées et évalués à l’aune de leur efficacité empirique du point de vue des utilisateurs (les kits MST valant comme traitement des troubles de la fécondité). Dès lors, les populations ayant reconnu la pertinence du recours aux dispensaires pour le traitement de ces troubles, se pose la question du diagnostic par des personnels de santé sourds aux codes sémiologiques de leurs patients, et de l’accès au médicament, dans les conditions d’efficacité requises, par ces derniers.
007448ar
Popularité et scepticisme : opinions contrastées sur les médicaments1
null
Les auteurs de cet article discutent de deux points de vue différents sur les médicaments. Leurs propres recherches ainsi que d’autres études indiquent une grande popularité des médicaments dans les sociétés prospères comme dans les sociétés pauvres. Ils sont parvenus cependant à constater en même temps une attitude plus sceptique et réticente vis-à-vis des médicaments pharmaceutiques. Ils perçoivent ce scepticisme comme l’expression émergente d’une sorte de politique médicinale, qui se formule en termes de catégories individuelles et culturelles. Cette étude examine les raisons de la popularité mondiale des médicaments, et suggère ensuite que certains de ces mêmes facteurs peuvent aider à comprendre certaines réticences dans d’autres circonstances.
007449ar
Médicament et vieillesse
Trois cas de figure
Cet article emprunte une approche socioculturelle de la problématique de la vieillesse par rapport au médicament. Il appréhende avec un regard critique le phénomène « médicament » à travers trois énoncés de relations : le « médicament-obligation » comme qualificatif de la relation des personnes âgées au médicament ; le « médicament-concession » en tant que trame de fond de la relation thérapeutique entre médecin et patient âgé ; le « médicament-compassion », enfin, comme métaphore du rôle des médicaments psychotropes en lien avec le statut de la vieillesse dans nos sociétés occidentales avancées.
007450ar
Les médicaments dans l’espace privé
Gestion individuelle ou collective
La consommation et le rangement des médicaments par les patients dans l’espace domestique témoignent d’une relation à soi, à son corps et à l’Autre. À travers l’étude des pratiques individuelles et familiales relatives à la consommation médicamenteuse et à la disposition des médicaments dans l’espace domestique, observées dans des familles d’origines catholique et protestante, cet article montre que ces pratiques ne sont pas le résultat d’un choix personnel. Elles sont socialement construites, et cette construction diffère selon l’appartenance culturelle des patients. En outre, l’auteur tente de découvrir les logiques symboliques qui sous-tendent ces pratiques et met au jour les oppositions structurelles privé-public et individuel-collectif autour desquelles elles s’organisent.
007452ar
Les objets sportifs
Comment des biens banalisés peuvent constituer des référents identitaires
L’article se propose de montrer que l’usage des objets sportifs comme référents identitaires est relativement exemplaire des changements plus vastes faisant de la consommation un élément important de l’affirmation de soi. La déstabilisation des grands repères symboliques de nos sociétés a donné à ces objets banalisés, généralement peu durables, produits et vendus à l’échelle internationale, une importance qui va bien au-delà de leur utilité. Les dimensions émotionnelles et narratives des spectacles sportifs organisent une trame, largement exploitée par le marketing, dans laquelle les marchandises se chargent de sens. De nombreux usages non sportifs des produits se font en référence à la médiatisation des spectacles sportifs, mais les usages ne peuvent se réduire à cela. La diffusion de la culture de la pratique sportive explique d’autres usages des objets sportifs dans lesquels s’expriment et se rappellent également des émotions et des liens sociaux. Ce travail montre, en s’appuyant sur l’exemple français, que les usages des objets sportifs reflètent des mutations du symbolique.
007477ar
Desfontaines travesti : une « Dame angloise » traduit les Avantures de Joseph Andrews de Fielding (1743)
null
À partir de l’analyse de certains éléments du paratexte de la première traduction française d’un texte de Henry Fielding, soit Les Avantures de Joseph Andrews, et du ministre Abraham Adams de Pierre-François Guyot Desfontaines, cet article montre comment la censure, entendue dans tous les sens que ce terme prend à l’époque, influe sur la traduction et, simultanément, comment Desfontaines répond, dans le paratexte de sa traduction et dans d’autres textes, au phénomène de la censure. L’ensemble du paratexte du Joseph Andrews français semble faire appel à une série de procédés associés, au XVIIIe siècle, aux mécanismes de la censure politique et littéraire, qu’on lui donne le sens de critique ou d’interdiction d’un ouvrage. Le personnage de « La Dame Angloise » assumé par Desfontaines, critique dans ses « notes » et dans sa « Lettre » les usages décrits par Fielding et, par la même occasion, les coutumes de sa propre nation. De tels commentaires visent normalement à défendre le texte et les choix du traducteur contre les attaques des critiques et censeurs trop épris de morale.
007478ar
La censure en tant que blocage : la littérature interdite dans la dernière phase de la monarchie habsbourgeoise
null
Selon Stephen Greenblatt, toute culture est une « façon par essence instable et médiatrice de modeler l’expérience », et c’est seulement à travers un ordre imaginaire d’exclusion qu’une culture peut passer pour une entité stable. Greenblatt nomme une telle exclusion « blocage », phénomène qui se produit sans cesse, sans quoi surviendrait un effondrement de l’identité culturelle. Qu’est-ce que cela signifie pour la pratique de la traduction, étant donné que de tels « blocages » (par exemple manipulation textuelle ou ré-écriture) peuvent être considérés comme des éléments constitutifs du processus de traduction ? Dans le présent article, cette question sera étudiée dans le contexte spécifique de la pratique de la traduction durant la dernière phase de la monarchie habsbourgeoise. L’article analysera les différents agents qui sont à la base des mécanismes de sélection en matière de traduction et examinera par la suite le phénomène de la censure non seulement dans un contexte métaphorique mais du point de vue de ses aspects institutionnalisants. Les facteurs impliqués dans la sélection des textes à traduire, tout comme dans la sélection des stratégies de traduction, sont multiples, liés les uns aux autres par une relation d’interdépendance. La sélection des textes représente nécessairement un filtre important pour l’analyse d’une période déterminée, s’avérant ainsi un agent-clé dans le processus de réception. D’autres agents importants sont les « patrons », eux-mêmes souvent traducteurs et médiateurs culturels, ainsi que les traducteurs, qui proviennent de différents contextes et prennent part aux discours culturels de leur époque de manière très variée. Sans oublier le rôle des éditeurs et critiques littéraires comme principaux filtres de la représentation de l’Autre culturel dans une culture spécifique. Le modèle de « blocage culturel » dévéloppé par Greenblatt sera examiné dans ce contexte. L’article analysera dans quelle mesure on peut l’appliquer à la traduction – et dans quelles limites. C’est dans le cadre de la traduction que la question de la représentation de l’Autre est d’une importance primordiale et que le « blocage » illustre particulièrement bien la reconnaissance de la distance culturelle.
007479ar
La Louisiane : une trahison américaine telle qu’illustrée dans la traduction de Vue de la colonie espagnole du Mississippi de Berquin-Duvallon
null
Une relation de voyage anonyme publiée à Paris par un colon réfugié de St. Domingue en 1803 et traduite par John Davis à New York en 1806 constitue un cas particulièrement intéressant de traduction et censure parce qu’elle s’insère dans un contexte idéologique des plus complexes, celui de l’achat de la Louisiane. Après une courte période pendant laquelle elle est redevenue officiellement française au terme de 40 ans de gestion espagnole, la colonie sera achetée pas les États-Unis en 1803. La traduction de John Davis illustre ce moment charnière dans l’histoire de la Louisiane par la récupération hostile d’un texte qui reliait explicitement la Louisiane à la France et par les stratégies censoriales auxquelles le traducteur a recours. Dans une perspective postcoloniale, il est possible d’isoler les éléments déjà présents dans le texte original et qui rendaient sa traduction souhaitable dans le but d’informer les investisseurs américains. Cet exemple de traduction coloniale permet de mieux comprendre comment les relations discursives renforcent le pouvoir et le rôle manipulateur que joue la traduction en s’appuyant sur la censure.
007480ar
La littérature étrangère en Italie fasciste : circulation et censure
null
Dans cet article, l’auteure présente certaines des stratégies que les traducteurs et les éditeurs italiens adoptaient — ou étaient obligés d’adopter — pour s’assurer de l’acceptabilité de leurs textes aux yeux du régime fasciste. En premier lieu, l’auteure identifie les sujets considérés comme « tabous » et cherche à décrire dans leurs grandes lignes quels étaient les critères d’acceptabilité, au demeurant plutôt flous. Dans un deuxième temps, elle examine les mécanismes qui furent mis en place pour le contrôle des livres — essentiellement, la censure préventive et la saisie par la police — sous la dictature. L’auteure soutient que l’appareil étatique n’eut qu’un succès partiel sur le contrôle du contenu des oeuvres littéraires. Cette contextualisation historique, basée à la fois sur des documents d’archives et sur des documents publiés, est suivie de plusieurs études de cas portant d’une part sur trois romans de John Steinbeck et d’autre part sur Americana, la célèbre anthologie de littérature américaine publiée pendant la Seconde Guerre mondiale. En conclusion, l’auteure met en évidence l’absence d’une politique rigide de la part du régime en matière de traduction, malgré sa volonté d’influer sur l’interprétation des livres.
007481ar
Traductions censurées dans l’Espagne de Franco: Le projet TRACE — Théâtre et romans traduits de l’anglais en espagnol
null
L’objet de cet article est de déterminer s’il existe des phénomènes de traduction propres aux sociétés ayant utilisé, de façon habituelle, la censure, telle l’Espagne de Franco, et, le cas échéant, si ces phénomènes sont exclusifs à ces contextes de réception. À partir des données du projet TRACE, on fait l’analyse selon deux points de vue : a) celui des restrictions externes imposées par la censure officielle et b) celui de ses effets, à long terme, sur le contexte récepteur. Notre étude fait apparaître l’existence de trois processus importants de transfert dans cette période : l’adaptation, la pseudo-traduction et le clonage en masse de genres, de stéréotypes de personnages et de situations — ainsi que l’importance des chaînes intersémiotiques qui mettent en liaison des textes entre des langues différentes et entre des modes textuels divers. Quand on met en contraste ces traductions avec des analyses de textes traduits à l’heure actuelle, nos évaluations semblent indiquer que les trois phénomènes étaient beaucoup plus développés lors de la période étudiée; cependant ils ne sont pas exclusifs aux contextes de censure officielle.
007482ar
La censure des traductions de fiction dans l’Allemagne nazie
null
Cette étude décrit les processus de censure qui touchaient la traduction sous la domination nazie. En dépit d’une attitude résolument soupçonneuse à l’égard des traductions de fiction, le régime nazi ne les a pas simplement éliminées. En fait, loin de chuter en 1933, la publication de traductions de fiction s’accrut même jusqu’à la guerre, à la fois en termes absolus et proportionnellement à la publication des oeuvres de fiction en général. Toutefois, si en termes purement quantitatifs la traduction prospère, les chiffres masquent de profondes modifications qualitatives : les auteurs, traducteurs et éditeurs juifs et anti-nazis disparurent ; les genres sûrs à la vente en arrivèrent à dominer le marché et les préférences pour ce qui est des langues sources changèrent. Ces glissements provenaient indubitablement des mesures radicales de l’État, à la fois la censure « négative » — l’interdiction de produits littéraires ou de producteurs, ou l’imposition d’une auto-régulation « volontaire » — et la promotion énergique de formes de traduction approuvées. En même temps, une étude plus détaillée suggère que, même pour les formes non approuvées, l’influence du contrôle de l’État n’était pas toujours très nette. À l’époque, dans le cas des traductions de romans policiers, la censure à la traduction était un amalgame d’intervention de l’État, de filtrage préventif, de lectures sélectives du genre d’origine et de pressions normales du marché éditorial. Même dans ce contexte totalitaire d’extrême contrôle littéraire, il reste difficile de définir les frontières de la censure sur la traduction en tant que telle.
007483ar
La traduction des textes déjà censurés
null
Cet article fait référence à un événement de l’histoire contemporaine, lourd de conséquences politiques : la première visite du pape Jean-Paul II en Pologne, en 1979. Tous les textes des homélies du pape ont été disponibles, sous forme écrite, ainsi que leurs traductions, dans les centres de presse, pour les besoins des journalistes. Mais comme ces textes ont été soumis aux autorités avant la visite, il est clair que le pape lui-même a dû censurer plusieurs de ses textes, puisqu’il lui était impossible de dire ouvertement ce qu’il voulait. Ainsi, une des caractéristiques de son style consistait à intégrer beaucoup de sous-entendus, d’implicites, de non-dits ou d’allusions, clairs pour les récepteurs indigènes mais restant obscurs pour les récepteurs étrangers. Ayant travaillé en tant qu’interprète pendant cet événement avec les journalistes du Figaro, l’auteure de cet article dispose de ce matériel inédit. En s’appuyant sur une trentaine de textes présentés par le pape, l’auteure a essayé de décrire certains traits caractéristiques des textes censurés, ainsi que les opérations linguistiques effectuées, pendant leur traduction, pour permettre aux récepteurs étrangers d’accéder au sens caché de ces textes.
007484ar
John Steinbeck et la censure : le cas de The Moon is Down traduit en français pendant la Seconde Guerre mondiale
null
John Steinbeck et la censure: le cas de The Moon is Down traduit en français pendant la Seconde Guerre mondiale. Prenant la notion de censure dans le sens restreint où un texte appartenant au champ littéraire est manipulé selon des enjeux du champ politique dans une société à une période donnée de son histoire, nous analysons le cas de la présumée censure de The Moon is Down dans deux traductions françaises effectuées pendant la Seconde Guerre mondiale: celle publiée aux éditions Marguerat à Lausanne en 1943 dans une traduction de Marvède-Fischer et celle publiée aux éditions de Minuit à Paris en 1944 dans une traduction d’Y. Desvignes (pseud. d’Yvonne Paraf). Selon les éditions de Minuit, les éditions Marguerat auraient produit une version censurée du texte de Steinbeck, et c’est à ce titre qu’elles s’autorisent à retraduire le texte. L’examen attentif du roman publié aux éditions Marguerat montre que cette traduction n’est pas censurante, en tous cas pas dans le sens indiqué dans la préface à la traduction des éditions de Minuit et qui fait entre autres état de prétendues «coupures» et «altérations» du texte original. La traduction des éditions Marguerat est, à la rigueur, une traduction que l’on pourrait dire «hypertextuelle», après Berman, du texte de Steinbeck, ce qui est sans doute l’une des raisons pour lesquelles les éditions de Minuit se sont méprises sur la nature de cette traduction.
007485ar
Les censures dans la traduction audiovisuelle
null
La censure est, aujourd'hui dans nos sociétés, une notion floue ou du moins elle tend à être utilisée pour signifier diverses réalités. Elle est synonyme d'interdiction mais rejoint aussi les entraves du marché, tel qu'il se développe actuellement. Elle peut enfin fonctionner comme un contrôle social intériorisé : c'est l'auto-censure. Ces trois types de censure existent dans l'audiovisuel. Quelles sont les positions possibles du traducteur dans les divers modes de traduction à l'écran, notamment le sous-titrage ? En quoi son auto-censure est-elle téléguidée, dirigée ?
007486ar
Normes et censure : ne pas confondre
null
Il arrive que des théoriciens associent à une forme de censure les interventions des relecteurs ou des réviseurs. C'est peut-être oublier qu'en matière de démarches évaluatives, les recherches sont guidées par le souci de l'objectivité. Le domaine des divers agents d'évaluation, c'est le respect d'une norme professionnelle connue, en même temps qu'évolutive, et garante de l'efficacité de la communication. Cette série de règles intériorisées par la profession garantit aussi la cohésion de cette dernière, et c'est là sa fonction sociale. La relecture et la révision ne sont pas la police de la traduction, mais ses gardiens.
007571ar
Les quartiers résidentiels fermés : une forme ségrégative qui menace la cohésion sociale à l’échelle locale dans les villes latino-américaines?
null
Les classes moyennes et supérieures choisissent de plus en plus souvent de vivre dans des quartiers résidentiels fermés (gated communities, en anglais) non seulement aux États-Unis, mais aussi en Amérique latine et dans d’autres régions du monde. La prolifération de cette forme résidentielle n’est pas sans s’accompagner d’enjeux politiques et pourrait mener à une fragmentation accrue des villes, en privant les populations les plus vulnérables d’un accès à des ressources urbaines publiques (infrastructures et services collectifs). L’article propose une analyse géopolitique de cette forme résidentielle dans le contexte latino-américain où elle connaît présentement une forte diffusion. Après une description des principales caractéristiques des quartiers résidentiels fermés en contexte latino-américain, en s’appuyant sur une discussion des notions de ségrégation, de solidarité et de cohésion sociale, l’article montre en quoi les quartiers résidentiels fermés sont des formes résidentielles ségrégatives qui menacent de façon particulière la cohésion sociale dans des villes où les pauvres forment une forte proportion de la population.
007572ar
Mobilité, accessibilité et cohésion sociale
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L’atteinte d’une certaine cohésion sociale dans une région urbaine repose en bonne partie sur la réduction des disparités socio-économiques internes. Ces disparités socio-économiques ne sont pas étrangères aux problèmes liés à l’emploi et au revenu des ménages, qui découlent des transformations subies par le marché du travail au cours des dernières décennies. Dans cet article, nous nous interrogeons sur l’influence des facteurs géographiques reliés à la mobilité quotidienne des personnes et à l’accessibilité des lieux d’emplois sur les disparités socio-économiques internes, qui constribuent ainsi à une éventuelle érosion de la cohésion sociale dans l’agglomération urbaine de Québec. En premier lieu, nous utilisons une typologie des différents types d’accès à l’automobile dans les ménages motorisés afin de mieux cerner la capacité d’atteindre les lieux d’emplois. En second lieu, nous utilisons un indice d’accessibilité aux emplois reposant sur le modèle de gravité et nous faisons ressortir quelques zones de résidence présentant des problèmes d’accessibilité aux emplois en transport public, en 1977 comme en 1996. Enfin, nous testons l’hypothèse d’une relation entre l’accès effectif à l’automobile, l’accessibilité aux emplois et un indicateur de cohésion sociale, le taux d’emploi. Les données exploitées proviennent des enquêtes origine-destination du Réseau de transport de la Capitale (RTC).
007573ar
Au-delà des mouvements sociaux : une typologie relationnelle des conflits urbains
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La recherche quantitative systématique sur l’activité conflictuelle est née dans les années 1960. L’étude des conflits urbains, qui peuvent revêtir la forme d’activités de protestation, est très souvent réalisée dans le cadre conceptuel des mouvements sociaux urbains. Cependant, il est maintenant établi que ces conflits ne sont pas tous le fait de mouvements sociaux et que le changement social ne procède pas que des mouvements sociaux. Comment, alors, analyser adéquatement les conflits urbains auxquels prennent part des acteurs et des actrices qui ne participent pas d’un mouvement social et de ses organisations? Le texte présente une typologie qui recouvre potentiellement l’ensemble des conflits urbains, quels que soient les acteurs et actrices qui y participent. Par là, il est possible, entre autres, de mettre en lumière les différents types d’activisme urbain féminin et le rôle crucial des femmes sur la scène urbaine.
007574ar
Partition multifactorielle de la croissance de l’emploi des pôles de la région de Québec-Chaudière-Appalaches : 1981-1996
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Plusieurs raisons justifient de s’intéresser à la croissance de l’emploi des pôles non métropolitains situés à proximité des régions métropolitaines de recensement (RMR). La présente étude propose une analyse de la variation de l’emploi, entre 1981 et 1996, des pôles de la région de Québec–Chaudières-Appalaches (QCA), au moyen d’une méthode de partition multifactorielle dérivée de l’analyse shift-share. Les résultats mettent en lumière un phénomène global de déconcentration de l’emploi, manufacturier notamment, mais aussi de féminisation de l’emploi, s’étendant au-delà des limites de la RMR de Québec. On constate ainsi non seulement un phénomène de suburbanisation de l’emploi, mais également un dynamisme particulièrement important des pôles d’emploi situés dans un rayon d’approximativement 50 km autour de la RMR de Québec. Au-delà de cette distance, l’évolution de l’emploi des pôles est beaucoup plus différenciée. Les résultats suggèrent ainsi que la distance à la RMR joue un rôle important dans la croissance de l’emploi des pôles non métropolitains de la région QCA.
007575ar
Sites web et identités en région au Québec
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L’identité se définit dans un rapport à l’autre. D’où l’idée d’examiner Internet, et plus précisément le web, comme lieu de construction identitaire; en moins d’une décennie en effet, Internet s’est imposé comme moyen de communication et de diffusion de l’information. Ce qui nous intéresse ici, ce ne sont pas les identités individuelles, mais les identités collectives. Notre investigation a porté sur les régions pour cerner le rapport entre une collectivité aux contours repérables dans l’espace social et géographique et sa projection dans un espace virtuel.
007576ar
Internet, outil de développement social?
null
Les technologies de l’information et des communications représenteraient des outils prometteurs pour favoriser la cohésion sociale. Parmi ces outils, Internet acquiert aujourd’hui une place de premier ordre dans la société. Le développement de ce réseau-monde est souvent présenté comme une fin en soi. De nombreux États encouragent l’appropriation de cette technologie en justifiant leurs actions par les nombreuses potentialités associées à Internet. Dans ce contexte, les individus privés de cet outil sont exclus. Cette nouvelle forme d’exclusion vient amplifier celles que vivent déjà ces individus. Cet article s’interroge sur les liens entre Internet et le développement social, plus particulièrement sur la place occupée par les sites de développement social sur la Toile et la manière dont ces organismes s’approprient le cyberespace par une analyse de contenu des sites Web. Les résultats d’une enquête apportent quelques éléments de réponse sur les possibilités de cet outil.
007577ar
L’insertion internationale et la cohésion régionale : le cas de la Ville de Québec
null
La ville de Québec, deuxième en importance pour sa population dans la province du même nom, entretient des relations internationales et diplomatiques depuis la fin des années 1950 avec des partenaires d’une dizaine de pays. Or, depuis le début des années 1990, on observe une accélération de ce phénomène, qui coïncide avec l’arrivée d’un ancien diplomate à la mairie de cette ville. Ce texte propose une analyse historique du comportement international de Québec, tant envers ses partenaires étrangers que domestiques, afin de cerner le rôle de la ville-centre. En effet, le désir d’insertion internationale de la municipalité semble inciter celle-ci à rechercher des partenaires au sein de son territoire immédiat, afin d’obtenir une base représentative plus large. L’éclosion d’un tel système de gouvernance voué aux activités internationales pourrait-il favoriser une plus grande cohésion régionale?
007921ar
L’humanité comme projet
null
Depuis toujours, la définition de l’humanité passe par la délimitation de la frontière entre « l’humain » et « l’inhumain » (ou encore l’« inapte à être humain », l’« indigne d’être compté parmi les humains », celui qui a « besoin d’être humanisé »). Les enjeux de pouvoir au coeur de la notion d’humanité, parfois masqués par la glose philosophique de l’humanisme, se constituent autour de cette frontière fréquemment modifiée par les impératifs politiques de chaque époque. Dans cet essai d’« herméneutique sociologique », l’auteur explore deux formes très contemporaines du débat sur cette frontière. D’une part, il réfléchit aux effets de pouvoir de la globalisation de l’économie de marché sur les formes d’humanité promues par notre époque. D’autre part, il traite des conséquences du multiculturalisme et de la reconnaissance du droit à la différence. Il termine en proposant une stratégie pour la reconstruction d’une humanité commune.
007924ar
La production politique de l’indifférence dans le Nouveau management public1
null
L’indifférence à autrui est un des risques inhérents au système démocratique qui ne peut forcer les concitoyens à participer aux débats publics sur le bien commun, ni à vivre concrètement le principe de la fraternité ou de la solidarité. La conscience de ce risque conduit à faire la critique politique du Nouveau management public, nouvelle idéologie de gestion qui vise à transformer les rapports entre l’État et les citoyens en une sorte de « méga-relation de service ». En effet, en faisant du citoyen un client, cette idéologie tend à encourager le choix de l’indifférence au détriment d’un renforcement de l’éthique de la concitoyenneté. Cet article s’efforce d’analyser ce discours afin de comprendre comment se produit ce glissement sémantique et politique et pourquoi il séduit tant les élites politiques actuelles des riches démocraties de l’OCDE.
007925ar
Espaces et lieux d’humanisation : quel statut accorder aux productions techno-scientifiques?
null
La multiplication des innovations techno-scientifiques marque de façon toute particulière le monde contemporain. Quel statut doit-on leur accorder? L’espace actuel de la réflexion critique ne les rend-il pas d’emblée suspectes, sujettes à condamnation, coupables d’une perte de lien social et d’humanité? Axées sur l’efficacité, porteuses d’uniformisation et de contraintes à l’expression du subjectif, ces innovations ne sont-elles pas, par nature, déshumanisantes? Dans cet article, l’auteure tente d’ouvrir d’autres espaces de réflexion pour penser les techno-sciences et la façon dont elles interviennent dans le débat sur la déshumanisation et la réhumanisation. Tirant profit d’une recherche à travers laquelle elle a suivi le travail d’invention d’une nouvelle méthode contraceptive, l’auteure fait valoir la portée, mais aussi les difficultés, d’une démarche qui met en doute les frontières apparemment hermétiques et infranchissables entre ce qui relève du monde des choses et ce qui relève de l’humain.
007926ar
Quel humanisme pour un âge post-génomique?
null
Contre le « généticisme » qui tend à ramener la complexité des êtres vivants, y compris de l’humain, à un programme inscrit dans les gènes, l’anthropologie met en évidence l’intrication de l’histoire biologique et sociale des humains, dans une prise en compte du travail du temps et de la culture. Face aux biotechnologies désormais en mesure de retravailler la Nature et de remodeler les espèces vivantes, je montrerai qu’il ne reste aux humains que le devoir de responsabilité à l’égard de la vie et l’obligation de solidarité avec toutes les espèces vivantes. L’humanisme à inventer devra être un humanisme qui fait une place, en son coeur même, à la révolution de la géno-protéomique et aux biotechnologies tout en réinscrivant l’humanité dans la longue histoire évolutive des vivants qu’elle achève en quelque sorte.
007928ar
L’errance et la distance
La déshumanisation comme figure de l’humanité1
Loin que la « déshumanisation » puisse être conçue comme un « résidu » archaïque qui survivrait au sein d’une modernité rationnelle au plan moral (droits de l’homme) et scientifique, elle accompagne consubstantiellement la radicalisation du processus d’humanisation, qui se définit selon une distance ontologique inédite entre les sphères du « sujet », compris comme individu autonome, et de l’« objet », saisi comme système de connaissance et d’activité. Cet éloignement entre les compréhensions idéale et cognitive du devenir humain engendre une errance métaphysique, perceptible à travers l’inintelligibilité de la « nature » humaine, à la fois déclarée fondatrice de l’ordre social et inexistante autrement que transformable à l’infini. Au contraire, la reconnaissance du caractère intrinsèquement normatif de l’activité sociale-historique, notamment dans les universels concrets que sont les cultures, introduit la saisie du rapport d’objectivation, antérieur à la distinction sujet-objet, comme source médiatrice de toute relation au monde.
007930ar
Les minorités nationales : volonté, désir, homéostasie optimale
Réflexions sur le biculturalisme en Nouvelle-Zélande, en Espagne, au Québec et ailleurs1
Un fondement possible de l’analyse anthropologique de l’être humain de l’avenir serait la philosophie de Sloterdijk qui renouvelle celle de Nietzsche. Si l’on prend comme exemple d’une telle analyse le cas des « minorités nationales » des États-nations, les données semblent dessiner la coexistence négociée comme le modèle de base du posthumanisme. Ce modèle, exigeant beaucoup de complicité entre les ethnies et niveaux hiérarchiques, promet d’amener des combats mondiaux d’auto-détermination et dépendra beaucoup des structures intermédiaires qui communiquent entre les communautés. L’article analyse en détail les rôles des intermédiaires et la nouvelle philosophie qui sous-tendent ces rôles, où le souverainisme tiendra le rôle clef d’agent de sécurité des mouvements alternatifs.
007967ar
Un siècle de boires et de déboires : Hull aux prises avec son histoire et sa géographie
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À trois reprises au cours du siècle dernier, la situation frontalière de Hull, entre l’Ontario et le Québec, a concentré en des points précis de son territoire un nombre important de débits d’alcool et donc une mouvance sociale (à la fois festive et « criminelle » ou tout au moins interlope) qui est devenue intolérable pour les élites locales. Le présent article fournit une interprétation géographique et historique de ces trois cycles d’ordre et de désordre urbains. Informé par les réflexions théoriques récentes sur le lieu, il interprète l’espace festif de Hull à la fois comme résultat contingent de processus divers, médiateur des relations sociales et foyer de représentations qui ont participé à la dynamique de ce lieu sous tension. Enfin, en inscrivant son analyse dans le cadre d’une géographie frontalière, il met en lumière le caractère unique de Hull, ville située au contact des populations francophone et anglophone, québécoise et ontarienne ayant eu, de longue date, des attitudes culturelles bien différenciées en matière de consommation publique d’alcool.
007968ar
Analyse multicritère et SIG pour faciliter la concertation en aménagement du territoire : vers une amélioration du processus décisionnel?
null
La planification d’une section de parc linéaire de moins de 15 kilomètres a généré une situation très complexe à la MRC de Portneuf (Québec, Canada). La MRC, face au mécontentement de certains groupes de citoyens, a eu à définir une ligne d’action à partir de cinq scénarios d’aménagement produits par les différents groupes de parties prenantes. Les consultations n’ayant pas abouti, les protagonistes ont poursuivi le débat devant les tribunaux. Dans cet article issu des travaux de notre thèse de doctorat, nous voulons montrer comment l’application d’une approche méthodologique intégrant un référentiel d’aménagement, des outils de systèmes d’information géographique (SIG) et une méthode d’analyse multicritère à la décision (AMCD) pourrait aider à départager les préférences des acteurs territoriaux pour faciliter la négociation et simplifier le processus décisionnel.
007969ar
Les difficultés de gestion d’un littoral de survie à Haïti
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Les littoraux haïtiens abritent de nombreuses activités : la pêche, le cabotage, l’exploitation des mangroves. La crise économique conduit aussi des populations issues de l’intérieur de l’île à accaparer le littoral et ses potentialités. Tout ceci entraîne des déséquilibres au sein des écosystèmes sensibles comme auprès des populations traditionnellement littorales. La misère généralisée des individus et la pauvreté de l’État limitent les possibilités de gestion efficace. Les côtes du golfe de la Gonave sont dominées par Port-au-Prince, qui génère le plus de flux et de conflits d’usage. La côte des Arcadins est en attente de la reprise du tourisme et, enfin, l’ouest du Canal du Sud s’enferme dans le déclin et l’isolement.
008087ar
L’incendie créateur de quartier ou comment le risque dynamise le territoire
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L’incendie peut-il contribuer à créer un quartier et à jouer un rôle moteur dans la construction urbaine? Cette question prend à rebours la vision habituelle des incendies, une vision catastrophique et destructrice, où l’incendie ne laisse que cendres et débris sur son passage. Si le sinistre lui-même a des conséquences dramatiques, il peut aussi entraîner d’importantes transformations et contribuer à la création de nouvelles unités urbaines. Cependant, ce risque est rarement considéré sous cet aspect et les mécanismes procédant à la réalisation de ces transformations ont peu retenu l’attention. En s’appuyant sur un exemple (le quartier Saint-Sauveur à Québec), cet article propose une réflexion théorique sur les façons de conceptualiser l’incendie et le risque d’incendie comme faisant partie des forces qui concourent à la structuration de l’espace urbain.
008088ar
La gestion intégrée de l’eau : dynamique d’acteurs, de territoires et de techniques
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La gestion intégrée de l’eau au Québec, qui a récemment fait l’objet d’une consultation publique, a soulevé une diversité d’enjeux qui met en question la capacité des institutions d’y faire face de manière optimale. Les préoccupations notées lors de cette consultation ont abouti à un certain nombre de constats qui avaient déjà été émis lors d’un autre exercice de consultation réalisé il y a plus de trente ans (commission Legendre en 1970, voir CEPJE, 1971) et, surtout, à une première expérimentation de gestion par bassin versant au Québec : le plan d’aménagement du bassin de la rivière Yamaska, un projet qui, pour une bonne part, a été oublié dans la foulée des multiples projets et innovations institutionnels des années 1960 et 1970. Le présent texte constitue une analyse rétrospective visant à rappeler le contexte d’émergence de la gestion intégrée de l’eau au Québec et les difficultés de mise en oeuvre d’une telle politique. On pourra dès lors établir certains parallèles avec les enjeux actuels sur le plan de la capacité d’action des acteurs institutionnels.
008089ar
« Garder le beurre et l’argent du beurre? » Utilité, écologie, équité et la Loi québécoise sur les forêts de 2001
null
La nouvelle Loi sur les forêts semble avoir renforcé la position du gouvernement du Québec en tant qu’arbitre du secteur forestier. Du point de vue de la communauté forestière, il semblerait que le gouvernement ait créé des mécanismes favorisant une participation plus importante d’une plus grande variété d’acteurs de la foresterie et que certains progrès aient été faits vers une foresterie plus acceptable socialement et écologiquement. Un examen plus attentif de la nouvelle Loi révèle cependant que la situation est loin d’être claire. En explorant ce qui ressort jusqu’à maintenant de la révision de la Loi, nous pouvons avancer que celle-ci n’a pas remis en question de façon importante l’hégémonie d’une coalition de développement économique. Certains indices laissent croire également que l’industrie et le gouvernement utilisent les forums de consultation comme des tribunes pour informer le public, sans vraiment prendre en compte le point de vue des participants. Une coalition environnementale a su se faire entendre quelque peu, mais l’introduction, en foresterie, de l’objectif de rendement accru pourrait compromettre la protection de l’environnement forestier. De même, une coalition pour le développement autochtone a également obtenu quelques gains, mais ceux-ci sont en général confinés au territoire cri et n’ont que peu d’effet au sud.
008090ar
Une critique de la notion de frontières artificielles à travers le cas de l’Asie centrale
null
Depuis la disparition de l’URSS, en 1991, l’Asie centrale est partagée entre cinq États. Complexes, ses frontières sont passées brutalement du statut de frontières intérieures à celui de frontières internationales. Certains auteurs n’hésitent pas à recourir à la catégorie de « frontière artificielle » pour les décrire. Pourtant, ce concept est fort réducteur et contestable, tout autant que celui de « frontière naturelle » : tous les deux renvoient à des représentations très idéologiques des frontières étudiées. Par ailleurs, l’histoire des tracés témoigne des préoccupations qui ont présidé au découpage de l’Asie centrale à l’époque soviétique : elle révèle des critères de gestion qui ne font pas des frontières de l’Asie centrale des tracés ontologiquement différents des autres frontières du monde. Les États nouvellement indépendants d’Asie centrale ont, certes, hérité de frontières complexes, mais la question de leur gestion pacifique relève beaucoup plus des volontés politiques des gouvernements que d’une prétendue nature artificielle des tracés.
008194ar
null
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Distinct du secteur privé à but lucratif (premier secteur) et du secteur public (deuxième secteur), le troisième secteur regroupe des organisations indépendantes, légalement constituées, à but non lucratif, ayant des activités fondées en partie sur le bénévolat et visant, à des degrés variables, la transformation des rapports sociaux, l'inclusion politique des usagers et des consommateurs et la démocratisation du travail. Cet article s'intéresse particulière-ment au rapport salarial dans ces organismes. L'analyse des données révèle qu'il existe une variété de formes du rapport salarial dans le troisième secteur et qu'au moins cinq phénomènes expliquent cette variété : les tendances sociétales en matière d'emploi, l'intervention étatique, le territoire, le domaine d'activité, la taille des organismes et l'action des mouvements sociaux.
008507ar
null
null
Le présent article fait état des résultats d'une étude portant sur l'influence qu'exerce le milieu social d'appartenance sur les croyances, les connaissances et les comportements associés à la santé et à la maladie chez un groupe de femmes âgées francophones demeurant dans la région urbaine de Moncton, au Nouveau-Brunswick. L'objectif de cette recherche consistait à repérer des représentations de la santé chez trois groupes de femmes âgées issues du milieu populaire, de la classe moyenne et de l'élite locale, introduisant ainsi la notion de culture de milieu et son incidence sur les attitudes et les comportements associés à la santé. Les résultats de cette étude nous ont permis de dégager un certain nombre d'idées partagées par l'ensemble des répondantes au sujet de la santé et de la maladie ainsi que de mettre en lumière des éléments de représentation de la santé propres aux femmes issues du milieu populaire, d'une part, et de la classe moyenne, d'autre part. Les résultats obtenus ne nous ont cependant pas permis de dégager des éléments constitutifs d'une représentation de la santé qui soit caractéristique des femmes faisant partie de l'élite. Globalement, pour les femmes âgées issues du milieu populaire, la santé et la maladie s'expliquent en référence au destin, à la chance/malchance, au travail ainsi qu'aux habitudes de vie. Pour les femmes âgées issues de la classe moyenne, la santé et la maladie sont davantage liées à la responsabilité et à la volonté personnelles. Quant au discours des femmes issues du milieu de l'élite sur la santé et la maladie, il est caractérisé davantage par le thème du contraste entre le monde passé et le monde actuel. Cette étude contribue directement à l'élargissement des connaissances sur la diversité relative aux milieux d'appartenance dans le champ de la gérontologie sociale et sur l'impact qu'elle a sur l'intervention sociale et sanitaire.
008556ar
Les limites de l’analyse contextuelle et de la cohérence comme critères en critique des traductions : un cas d’erreur sur la personne dans les traductions françaises du Lazarillo de Tormes
null
Contrairement à ce qui est habituellement véhiculé en traductologie, nous faisons valoir dans cet article que les notions de cohérence, d’analyse contextuelle ou d’intention de l’auteur ne sont pas toujours éclairantes pour les fins spécifiques de la critique des traductions. Nous procédons d’abord à une lecture critique succincte de la notion d’unité qui se trouve au centre de l’analytique des traductions chez Antoine Berman, puis présentons l’importante relecture, de la part de l’hispaniste Paul Julian Smith, de cette même notion qui traverse l’ensemble du discours de la critique traditionnelle au XXe siècle du roman picaresque espagnol anonyme du XVIe siècle, La vida de Lazarillo de Tormes, y de sus fortunas y adversidades. Nous situons notre propre projet critique des traductions françaises du Lazarillo de Tormes en marge de cette quête d’unité afin de mettre en avant un modèle d’analyse des ambiguïtés syntaxiques qui puisse prendre en charge les interprétations multiples en découlant et non pas forcément s’appuyer sur le besoin de recentrer le texte ou de le ramener à un tout cohérent. Afin d’illustrer ce propos, nous faisons appel à l’analyse stylistique de la syllepse (au sens de Michael Riffaterre) telle qu’elle se manifeste dans certains passages du Lazarillo de Tormes et de ses cinq traductions françaises parues entre 1560 et 1968.
008557ar
La traduction et l’image de l’auteur : le cas du Romancero gitano de Federico García Lorca
null
À l’encontre de l’affirmation de Barthes voulant que l’auteur soit mort, laissant place à son oeuvre, délivrée de ses origines personnelles, je soutiens que l’image de l’auteur est loin d’être absente de la pratique de la traduction littéraire. D’une part, l’image de l’auteur dans un système littéraire et social donné peut déterminer quels ouvrages sont traduits et comment ils sont traduits. D’autre part, il est probable que certaines caractéristiques d’une personne soient mises en valeur plus que d’autres, selon le choix des textes originaux traduits et la présentation faite de l’auteur et de son oeuvre dans les préfaces et autres commentaires accompagnant les traductions. De plus, les stratégies de traduction vont souvent dans le sens des tendances dominantes de réception et contribuent ainsi à réaffirmer une certaine perception de l’auteur dans la culture d’arrivée. Dans le cadre de cet article, j’explorerai ces hypothèses en prenant l’exemple de l’auteur espagnol Federico García Lorca et de quelques traductions de son Romancero gitano (1929) vers le français, l’anglais et le néerlandais. J’examinerai la corrélation possible entre l’image « folklorisante » de Lorca dans les premières études critiques et l’emphase mise sur le côté romantique, naïf et mythologique dans les traductions de son oeuvre, et inversement la corrélation entre l’image plus sombre et complexe présentée de l’auteur plus tard et les stratégies de traduction qui font ressortir les éléments qui correspondent à cette vision.
008558ar
Berman et Toury: la traduction et la traduisibilité de deux cadres théoriques de recherche
null
Une discussion initiale portant sur Kuhn, Lyotard et Boothman permet d’établir la « traduisibilité » d’un cadre théorique de recherche. Les cadres théoriques en traductologie de Berman et de Toury sont ensuite examinés à la lumière des concepts des théoriciens mentionnés ci-haut, ainsi que de concepts empruntés à la théorie de la traduction interlinguistique. Les cadres théoriques de Berman et de Toury sont fortement incompatibles en raison de l’«incommensurabilité » des idées qui les sous-tendent. Cependant, une équivalence partielle de concepts s’est développée avec l’évolution des théories dans le temps. Lorsque Berman « traduit » Toury, dans le sens qu’il discute ses idées, des phénomènes analogues à ceux trouvés en traduction interlinguistique émergent : équivalence, transférence, déplacements, appropriation et contresens. Sans aucun doute si Toury devait « traduire » Berman, la même situation se produirait. Notre recherche propose une version nuancée de la théorie de Lyotard : l’incommensurabilité non-absolue entre discours ou cadres de recherche.
008559ar
Le bilinguisme législatif et la place de la traduction1
null
Le bilinguisme législatif a entraîné, au Canada, une forte présence de la traduction. Le texte de loi est souvent polysémique et hermétique, comportant dès lors son lot d’embûches pour le traducteur. Afin de pallier toute difficulté d’interprétation, la communauté juridique s’est dotée d’un principe fondamental, la règle d’égale autorité. Selon cette règle, les deux versions d’une loi ont le même statut, la même valeur. Or plusieurs juristes ont formulé de nombreuses critiques à l’endroit de la traduction. Ce qui a entraîné l’avènement de la corédaction des lois fédérales, qui a eu pour résultat d’évincer la traduction du processus législatif. L’objet du présent article sera, d’une part, de mettre au jour ces critiques et, d’autre part, de montrer la contradiction présente au sein de la communauté juridique.
008560ar
L’élaboration de la cohérence en traduction; le rôle des référents cognitifs
null
La cohérence, qui n'existe pas dans le texte a priori, relève de construits cognitifs. Dans le cadre des théories de la réception du texte, de la psycholinguistique et de la linguistique du texte, la cohérence est toujours définie par l'interaction entre le travail inférentiel du lecteur et certaines caractéristiques du texte. Cet article porte sur les indices de la construction de la cohérence, tels qu’ils se manifestent lors de la traduction. Il vise à montrer en particulier que ce processus s'arrime sur les référents cognitifs du traducteur. Nous discutons, en partant d'un protocole de verbalisation de traduction, l'hypothèse selon laquelle les référents cognitifs s'organisent, lors du traitement du texte à traduire, à la manière de réseaux conceptuels. Enfin, nous montrons que cette approche pourrait être davantage mise à profit dans une terminologie conceptuelle et cognitive. Mais, tout au long de l’article, nous insistons sur le rôle de la subjectivité du lecteur-traducteur, qui rend la construction de la cohérence aléatoire et relative.
008561ar
Mots divins, actes restreints : Walter Benjamin — une figure icônique paradoxale en traductologie
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Depuis un demi-siècle maintenant, la réputation de Walter Benjamin est légendaire dans le domaine de la traductologie. Les penseurs ont été fascinés par les concepts énoncés dans La Tâche du Traducteur, mais presque personne n’a regardé de plus près comment — ou même si — Benjamin a actualisé sa propre théorie, soit dans ses propres traductions, soit dans ses critiques des traductions d’autrui. Voilà l’objet de cet article.
008562ar
De la traduction comme vecteur clandestin de la rédemption : Franz Rosenzweig ou l’utopie messianique en l’absence de Dieu
null
Cette étude se propose d’examiner les multiples facettes de la théorie de la traduction élaborée par Franz Rosenzweig, à la lumière notamment de son postulat paradoxal selon lequel il n’existe qu’une seule et unique langue qui cependant se réalise et se peut retracer dans chacune des langues, quel que soit le stade ou le degré de leur évolution. Ce postulat est mis à l’épreuve au gré des diverses remarques, observations et notes critiques jalonnant le travail de traduction auquel Rosenzweig s’est lui-même livré, tout spécialement sa traduction d’hymnes et de poèmes de Jehuda Halévi ainsi que sa collaboration avec Martin Buber à une Verdeutschung de la Bible hébraïque. Ce labeur reçoit enfin un éclairage sans doute plus étonnant, mais néanmoins convaincant, en le replaçant dans l’horizon de l’eschatologie messianique qui sous-tend le propos de Rosenzweig, qui fait de la traduction un vecteur de la rédemption.
008563ar
L’interprétation et la traduction sur la côte ouest du Canada actuel à l’époque des explorations par mer et des débuts de la traite des fourrures sur le littoral (1774-1800)
null
L’interprétation n’a pas joué un grand rôle au cours des explorations par voie maritime, les contacts avec les Amérindiens étant la plupart du temps très brefs. Le cas des marchands est différent. Comme la récolte de fourrures était plus abondante quand on pouvait communiquer avec les autochtones autrement que par signes, l’interprétation a vite pris de l’importance. En outre, presque tous les marchands ont laissé au moins un lexique bilingue. Au cours de la crise de Nootka, au début des années 1790, toutes les négociations territoriales menées par Vancouver, qui représentait la Grande-Bretagne, et Bodega, qui représentait l’Espagne, ont dû être traduites. L’interprétation et la traduction y ont donc joué un rôle essentiel.
008569ar
Culture et politique de la culture1
null
Cet article traite de ce qui détermine les politiques de la culture. L’argument central est que les formes de culture résultent de l’expérience socialement construite – ce que j’appelle le substrat expérientiel de la culture – et que celui-ci voit le jour dans le contexte d’une existence sociale qui est elle-même reliée à des processus globaux. En abordant l’histoire du concept de culture dans ces termes, je montre que l’émergence des politiques identitaires depuis le milieu des années 1970 est en rapport avec ce processus plus large qu’est le déclin de l’hégémonie occidentale. De ce point de vue, les nouvelles politiques de la culture révèlent une véritable fragmentation politique et culturelle. Mais ce déclin constitue la base de la globalisation politico-économique et grâce à lui émergent des élites cosmopolites qui deviennent les hérauts du discours de globalisation. Ce discours fait à son tour partie de la polarisation de classe qui voit s’affirmer les nouvelles élites cosmopolites « hybrides » alors que s’éclipsent les pouvoirs locaux indigènes.
008570ar
Politique et imaginaire à Tchoukotka, aux confins orientaux de la Russie
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Cet article analyse comment, dans la péninsule de Tchoukotka (extrémité orientale de la Russie), un groupe d’activistes autochtones recourt à son imagination afin de susciter des initiatives politiques signifiantes pour les peuples autochtones de la région. Depuis le début des années 1990, à Tchoukotka, les perspectives politiques autochtones ont été sérieusement restreintes par des restructurations politiques et des réformes économiques de style occidental. Cet article s’interroge sur la façon dont les possibilités politiques peuvent être créées et modelées. Il repose sur un contexte d’aspirations sociales. Pour apprécier son potentiel et sa force, le lecteur doit d’abord se familiariser avec les transformations politiques et économiques en cours en Russie, y compris le recours, encouragé par l’État, aux traditions autochtones, à la rhétorique et aux pratiques de salut et d’assistance, ainsi qu’aux difficultés de l’organisation en faveur des droits culturels. Au travers de ces prismes, j’observe la façon dont un rêve précis prend une signification pour les peuples faisant face à des dilemmes particuliers.
008571ar
Montrer sans partager, présenter sans proférer
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Bien qu’un grand nombre de travaux ethnographiques novateurs aient été suscités par l’« espace interculturel » que se partagent Australiens autochtones et non autochtones, notamment dans le domaine des arts visuels, les chercheurs ont accordé moins d’attention aux représentations rituelles publiques auxquelles les Aborigènes ont donné un nouvel essor en tant qu’instruments politiques. On a encore moins écrit sur la (re)construction interne de l’identité sociale autochtone et sa projection dans la production de rituels publics sur la scène néocoloniale australienne contemporaine. Tout en effectuant une remise à jour des recherches précédentes sur la question, le présent article montre comment, au cours des dix dernières années, les leaders rituelles aînées d’une petite localité d’Australie centrale ont inauguré une phase entièrement nouvelle de représentations rituelles – une phase qui diffère substantiellement des formes antérieures d’expérience cérémonielle, qui étaient étroitement liées à la négociation et à l’échange des matériaux rituels.
008572ar
La forêt peut-elle être plurielle?
null
Cet article compare les conceptions de la biodiversité véhiculée par les développeurs avec celles de la société Kasua de Nouvelle-Guinée. Il remet en cause la tendance hégémonique qui consiste à nier les différences culturelles en niant les différences de traitement ontologique que les autres non-Occidentaux prêtent aux non-humains et a fortiori aux humains.
008573ar
Une question éthique venue de l’autre monde
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L’auteur reprend la question posée par L’énoncé de politique des trois Conseils. Éthique de la recherche avec des êtres humains, plus particulièrement en ce qui a trait à la recherche avec les peuples autochtones : que peut donc vouloir dire « chercher avec » lorsque les chercheurs proviennent d’une culture autre que celle de la communauté autochtone? L’article démontre comment l’incorporation de l’anthropologue dans le monde autochtone conduit à des questions éthiques nouvelles. Les concepts de culture et de croyance chez Spiro permettent d’analyser cette expérience d’incorporation et de mettre en lumière les conditions d’une compréhension mutuelle entre Amérindiens et anthropologues.
008574ar
Techniques industrielles, le Japon et l’utilisation des capacités humaines1
null
L’auteur se demande s’il est possible de développer des techniques industrielles adaptées aux humains dans le capitalisme actuel. Le développement industriel capitaliste a donné lieu à des systèmes techniques, tels le taylorisme et le fordisme, fondés sur la subordination des humains aux machines. Pour Marx, cette subordination faisait partie intégrante des structures du capitalisme, fondé sur la rentabilité. Certains auteurs ont tenté de briser cette subordination, même dans le cadre du capitalisme, en imaginant des techniques, fondées sur l’informatique, qui requalifieraient le travail industriel. D’autres ont vu dans la mise en place de nouveaux systèmes dans les industries japonaises (systèmes Toyota et Fujitsu) des exemples de techniques industrielles différentes, qui redonneraient le contrôle des machines aux humains. En examinant de plus près l’utilisation japonaise des techniques industrielles, cet article en arrive à une conclusion mitigée : il y a des possibilités, mais limitées, de développement de techniques adaptées aux capacités humaines dans le capitalisme.
009760ar
Le bungalow québécois, monument1 vernaculaire
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Acteur archétypique du paysage construit, le bungalow, cette maison pavillonnaire construite en milliers d’exemplaires partout autour des villes, a – en dépit de sa standardisation – engendré un paysage particulièrement varié et profondément québécois. Ce premier de deux articles analyse la naissance du bungalow au Canada et le contexte, depuis la Première Guerre mondiale, de son apparition, en vue de jeter des bases à l’exploration de la « québécisation » du bungalow, au travers du phénomène de son succès et de son importante diffusion, des paramètres matériels de son appropriation, du corpus imaginaire de ses représentations et de la réappropriation dont cette antithèse du monument historique peut aujourd’hui paraître victime. En effet, si le bungalow tint sa vaste popularité du large éventail de ses appropriations possibles, sa survie est aujourd’hui mise en cause par le principe de sa construction standardisée même, sous la pression foncière sur l’immédiate périphérie urbaine qu’il a jadis investie. Support mémoriel paradoxal de notre XXe siècle, l’omniprésent bungalow, unique et pluriel à la fois, entame-t-il le chant du cygne?
009761ar
Les interactions entre cultures sportives de montagne et territoires : un état des lieux de la recherche française depuis 1990
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Les relations entre cultures sportives et territoires constituent un champ de recherche en plein essor en France depuis le début des années 1990. Une grille de lecture socio-spatiale est appliquée à un corpus de textes géographiques, sociologiques, historiques et ethnologiques portant sur cette question. Cette démarche est orientée selon quatre registres conceptuels (espace, spatialité, territoire, territorialité) et interactionnels (physique, fonctionnel, organisationnel, existentiel), qui mettent en perspective l’orientation thématique et le point de vue théorique des travaux pris en compte. Cet état des lieux des représentations scientifiques permet d’expliciter le phénomène de co-construction temporelle des cultures sportives et de leurs espaces d’action.
009762ar
Dualisme urbain et glissement du centre décisionnel, de la cité prétouristique à la ville touristique, dans l’Espagne méditerranéenne du début du XXIe siècle
null
Sur l’Arc méditerranéen, le tourisme de masse, depuis les années 1960, a façonné des villes duelles (agriculture/tourisme, pêche/tourisme, quartier permanent/quartier saisonnier). Deux grands types de stations opposent des appendices récréatifs, greffés sur des noyaux villageois, à des « stations planifiées », créées ex nihilo. Dans le premier type, dominant sur le littoral méditerranéen espagnol, la centralité urbaine s’est déplacée de la cité prétouristique à la ville touristique en quarante ans de développement de l’activité distractive. L’éclosion de sociétés mobiles et multirésidentes, en Europe, depuis les années 1990, contribue à accélérer cette tendance, qui est à l’origine du fonctionnement d’importantes discontinuités spatiales, sociétales et culturelles entre les différentes composantes urbaines.
009763ar
La filière féminine du karité : productrices burkinabè, « éco‐consommatrices » occidentales et commerce équitable
null
Dérivé de la noix de karité, le beurre de karité gagne de l’importance au sein de l’industrie des cosmétiques. Dès lors, le produit attire l’attention des organismes d’aide internationale et des défenseurs du commerce équitable qui tentent d’augmenter la rémunération des productrices de beurre. La caractéristique la plus marquante de la commercialisation contemporaine du karité est que le produit fait l’objet d’une filière féminine qui lie les productrices traditionnelles africaines de beurre aux « éco-consommatrices » occidentales. Cette configuration inhabituelle, propre à cette filière, est prometteuse pour les projets « femmes et développement », qui organisent les productrices en coopératives pour améliorer leur rémunération et leur fournir des technologies appropriées. Cependant, comme le montre cette étude portant sur le Burkina Faso, un des principaux pays producteurs de karité, la production de beurre exige énormément de labeur féminin. Cette recherche explore les diverses réticences à l’égard des « projets karité ».
009972ar
null
null
Bien que les projets de travail de rue soient nés dans les grandes villes, depuis quelques années nous remarquons un déploiement de ce type d’intervention sociale dans les régions éloignées du Québec. Mais très peu d’évaluations des effets de ces projets ont été réalisées. Les devis évaluatifs traditionnels ne sont ni acceptés par les travailleurs de rue et les jeunes, ni adaptés au contexte et aux valeurs véhiculées. En effet, l’approche de ces actions est fondée sur une réponse globale aux besoins des jeunes, visant l’autonomie et l’empowerment de ces derniers. Nous appuyant sur l’exemple d’une évaluation des effets du travail de rue dans une région rurale, nous tentons de montrer qu’une évaluation participative de type empowerment est l’une des stratégies à privilégier dans une telle situation. Nous présentons les détails du processus évaluatif et nous analysons comment ce dernier a permis d’autonomiser (empower) les travailleurs de rue.
010516ar
Point de vue des usagers sur une procédure d’évaluation clinique basée sur l’Indice de gravité d’une toxicomanie (IGT)
null
L’Indice de gravité d’une toxicomanie (IGT) est l’un des instruments les plus utilisés pour l’évaluation et l’orientation des personnes toxicomanes. Puisque l’évaluation constitue le premier contact entre la personne en demande d’aide et le milieu clinique, elle s’avère déterminante quant à l’implication du client dans le traitement. La présente étude s’intéresse spécifiquement à la perspective des usagers au sujet de leur évaluation menée avec l’IGT. Au total, 306 participants ont rempli un questionnaire à la suite de leur rencontre d’évaluation. Neuf d’entre eux ont été invités à se joindre à un groupe de discussion. Les résultats indiquent que 80 % des clients se disent très satisfaits de leur contact avec l’évaluateur. Un peu plus de 74 % des répondants ont indiqué que l’entrevue IGT leur a permis d’avoir une meilleure compréhension de leurs difficultés. Les questions qu’il comporte sont jugées claires et pertinentes. Des usagers soulignent qu’il leur a été difficile de se remémorer quelques faits en relation avec leur dépendance à l’alcool ou aux drogues. Les femmes, les personnes plus âgées et celles orientées vers des services de santé mentale rapportent avoir eu plus de difficultés à compléter certaines parties de l’IGT. En dépit de la lourdeur de l’outil et du caractère intrusif de certaines questions, l’IGT semble être bien accueilli par les usagers parce qu’il est administré dans une ambiance conviviale par des évaluateurs qui font preuve d’empathie. Ce contexte serait propice au développement d’un lien thérapeutique entre le client et l’intervenant.
010517ar
La Grille de dépistage de la consommation problématique d’alcool et de drogues chez les adolescents et les adolescentes (DEP-ADO) : développement et qualités psychométriques
null
La Grille de dépistage de la consommation problématique d’alcool et de drogues chez les adolescents (DEP-ADO) a été créée pour répondre aux besoins des milieux de pratique québécois. Cet article rapporte les résultats de deux études portant sur les qualités psychométriques de la DEP-ADO. Une première étude a révélé que l’outil était pertinent et possédait une très bonne validité d’apparence, tant auprès des intervenants que des jeunes. Une seconde étude a été menée auprès de 673 élèves de 14 à 17 ans provenant de trois écoles secondaires du Québec et de 64 jeunes inscrits dans des centres de réadaptation en toxicomanie pour évaluer la structure factorielle, la fidélité et la validité de l’outil. Les résultats indiquent que les qualités psychométriques de la DEP-ADO sont nettement satisfaisantes et se comparent avantageusement à celles constatées auprès des autres outils de repérage de la consommation abusive de substances psychoactives chez les adolescents (validité de construit, cohérence interne, fidélité test-retest et inter modes de passation, validité critériée concomitante). Fait intéressant, les analyses factorielles ont permis d’identifier, en plus d’un facteur global, trois facteurs dont le sens clinique est bien identifiable (consommation d’alcool et de cannabis, consommation d’autres drogues, conséquences de la consommation de substances psychoactives). Tout en confirmant de façon globale la validité et la fidélité de la version originale, l’étude a également permis d’y apporter des améliorations et d’ouvrir des perspectives nouvelles sur l’utilisation qui peut en être faite.
010518ar
Validation d’un questionnaire de motivation au traitement des toxicomanies
null
Le but de la présente étude consiste à construire et valider un instrument de mesure de langue française basé sur la théorie de l’autodétermination (Deci et Ryan, 1985). À cette fin, 352 personnes ont été recrutées dans un centre public de réadaptation pour personnes alcooliques et toxicomanes. Dans l’ensemble, les qualités psychométriques du Questionnaire de motivation au traitement des toxicomanies (QMTT) sont plutôt satisfaisantes. De plus, la population étudiée semble présenter un profil motivationnel caractéristique. Les implications cliniques d’un tel profil sont discutées.
010519ar
Le corps performant par le dopage. Notes sociologiques
null
Envisagée comme une pratique sociale, la conduite dopante ne peut être saisie que dans une relation à un univers symbolique qui lui donne un sens. Dès lors qu’une société voue un culte quasi unanime à la réussite individuelle, au progrès, à la puissance et à l’esthétique corporelle, chacun semble avoir le devoir de modeler son corps, le rendre plus performant avec des moyens licites ou illicites. Cette attitude expliquerait l’attrait grandissant pour certains produits dopants (qui tendent à gagner en popularité en France et en Europe), non seulement dans le monde du sport de compétition, mais aussi dans les différents espaces sociaux. Dans ce contexte, comment alors expliquer les résistances ainsi que les variations d’usage de produits dopants selon les sports et les univers sociaux ? L’une des réponses sociologiques possibles est que, selon le rapport au corps des personnes et leur « éthique faite corps », le recours et l’usage (occasionnel ou régulier) des produits dopants seront différents. L’attitude dopante traduirait alors un rapport libéral au corps que l’on peut qualifier provisoirement d’hexis libérale.
010520ar
Dilemmes de l’individualisme : un contexte sociétaire de l’usage de drogues
null
Cet article propose une réflexion sur le contexte de société – après postmoderne –, ses valeurs fondatrices, telles que l’individualisme et l’exigence de productivité, et les rôles multiples que la personne est appelée à y jouer (Taylor, C., 2002 ; Castel, R., 1995b,c). L’usage de drogues s’inscrit directement dans l’insertion sociale de l’individu, en soutien aux exigences lourdes de la société ou au contraire en retrait, jusqu’à la déstructuration (Ehrenberg, A., Mignon, P. 1992). Le retrait à plus long terme représentant un danger potentiel pour le bon fonctionnement de la société, la sanction sous forme de marginalisation et d’exclusion sociale est importante (Becker, H., 1985 ; Goffman, E., 1975). Alors que la sortie de la toxicomanie devient de plus en plus un fait établi, c’est-à-dire que la plupart des toxicomanes recouvrent une position plus productive dans la société (Castel, R., 1998a), qui plus est dans une proportion importante sans aide professionnelle (Coppel, A., In Padieu R. e.a., 1997 ; Mercier, In Commission sénatoriale Nolin, 2001), force est d’admettre que la personne toxicomane est un acteur agissant sur sa trajectoire (Crozier, M., Friedberg, E., 1977). Ce constat a des implications fondamentales sur la position autant du client en intervention que de l’intervenant. Quelques enjeux fondamentaux pour la prévention et le traitement sont présentés.
010606ar
Le passé recomposé?
null
À partir d’une réflexion sur l’évolution des collections et des expositions d’artefacts et d’objets d’art amérindiens aux États-Unis depuis le 19e siècle, l’auteur brosse un tableau des principales mutations des pratiques de catégorisation et d’exposition des collections ethnographiques aux États-Unis. Si au 19e siècle la rage de l’ordre incite les conservateurs à organiser les collections à partir de critères de forme et de fonctions des objets, au tournant du 20e siècle, sous l’influence de Franz Boas, ils s’appuient de plus en plus sur la géographie et les histoires culturelles pour catégoriser les objets et construire de nouvelles typologies. En muséologie, cette nouvelle orientation s’est traduite par les dioramas destinés à reconstituer un aspect du mode de vie traditionnel d’un groupe donné. Plus récemment, les musées américains tendent à esthétiser fortement les artefacts amérindiens pour en faire des objets d’art alors que les Amérindiens « patrimoinisent » les objets rapatriés des musées d’État.
010607ar
Exposition de vêtements de femmes des Premières Nations
null
Le vêtement, élément habituel des expositions ethnographiques, est généralement présenté à plat dans une boîte ou drapé sur un mannequin. En 1942, Frederic Douglas s’est servi des 53 vêtements de femmes des Premières Nations conservés au Denver Art Museum pour organiser un défilé de haute couture. Présenté plus de 150 fois entre 1942 et 1972, ce défilé visait à éliminer les préjugés raciaux en montrant que toutes les femmes aimaient les beaux vêtements. J’examinerai ici l’utilisation qui a été faite des vêtements des Premières Nations dans le cadre de ce défilé.
010608ar
Le rapatriement du matériel sacré des Pieds-Noirs
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Le rapatriement des objets sacrés a transformé les relations entre les musées et les Premières Nations. Souvent, il est à l’origine de nouveaux partenariats positifs. Devant une situation problématique, ces partenariats trahissent la nature coloniale des relations entre les musées et les Premières Nations. Le présent article examine la nature des connaissances des musées et des Premières Nations envers les objets sacrés et étudie la façon dont ces savoirs modifient la compréhension de ce qu’est le matériel sacré.
010610ar
Détruire pour conserver
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Les sociétés amérindiennes du Mexique oriental considèrent que des objets « autochtones » ayant une forte charge symbolique doivent, selon le cas, entrer ou rester dans la communauté, être occultés dans des lieux faisant traditionnellement office de « musées indigènes », ou bien être carrément rejetés et détruits. À partir de l’exemple otomi, on examinera le paradoxe consistant à éliminer physiquement des artefacts pour conserver leur charge énergétique, tout en reproduisant, dans le sillage du tourisme international, des objets destinés aux « musées des autres ».
010611ar
Les trois scènes de la Confédération crie à Chisasibi (Baie James)
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Cet article analyse quelques unes des scènes qui se déroulèrent simultanément en août 2001 à Chisasibi, communauté de l’Est de la baie James, lors d’une réunion de la Confédération des Nations Cries du Canada. Le fait que ces activités se déroulent ainsi en quelques heures au lieu de quelques semaines dans la vie quotidienne, crée une condensation d’espace-temps et d’authenticité. Entre Cris des plaines et Cris du subarctique se joue un jeu d’admiration réciproque où chacun représente pour l’autre l’Indien idéal, dans la recherche d’une identité qui aurait su à la fois préserver la chasse, la pêche et l’essentiel de la vie matérielle des Cris du Nord, sans oublier la danse, le chant et les liens au spirituel des Indiens des Plaines.
010712ar
null
null
Cet article porte sur les stratégies préventives utilisées par 84 femmes et hommes séropositifs. Son originalité est qu’il revoit la prévention à partir des concepts de l’interactionnisme symbolique s’intéressant à la sexualité et des principes de l’autodétermination et de la dialectique personne/environnement. Les résultats de la recherche révèlent que les stratégies préventives s’articulent à travers une diversité de pratiques et de situations. De plus, les concepts utilisés peuvent contribuer au renouvellement de la prévention dans le domaine du VIH-sida. Cela est d’autant plus pertinent que cette problématique, actuellement moins médiatisée, demeure toujours aussi présente dans le quotidien des personnes.
010714ar
L’interprétation en Colombie-Britannique à l’époque des explorations par voie terrestre et de la traite des fourrures dans les comptoirs (1793-1846)
null
Les journaux tenus par Alexander Mackenzie, Simon Fraser et David Thompson montrent que ce sont surtout des Autochtones qui ont servi d’interprètes pendant leurs voyages de découverte et que ceux-ci ont ainsi grandement contribué à en assurer le succès. Dans les comptoirs établis à la suite de ces explorations, les interprètes étaient essentiels. Le présent article traite de leur statut au sein des compagnies de traite, des dangers que comportait leur métier, de l’influence que certains avaient sur les populations locales et du rôle des femmes comme interprètes et comme enseignantes des langues amérindiennes. On y trouve également une esquisse de la personnalité et de la carrière de quelques interprètes.
010715ar
Les migrations culturelles en France et en Italie : la littérature de voyage devenue genre par le biais de la traduction
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Cet article approfondit le rôle joué par les traductions dans la reconnaissance de l’écriture de voyage comme un véritable genre littéraire en Italie et, en partie, en France. En effet, c’est grâce aux traductions que cette production variée a défini ses propres caractéristiques et normes. Aux XVIIIe et XIXe siècles, la plupart des oeuvres étaient connues en Italie à travers leurs traductions françaises qui avaient souvent subi des modifications transformant le point de vue des auteurs. Il en résulte un écart tant des contenus que des perceptions des écrivains de voyage entraînant une modification de l’interprétation par les lecteurs sur le pays visité.
010716ar
La Société Lutétienne
null
Cet article examine les traducteurs de la Société Lutétienne en tant que sujets traduisants et agents culturels. Les six traducteurs – Alexander Teixeira de Mattos, le chef du groupe, Ernest Dowson, Havelock Ellis, Percy Pinkerton, Victor Plarr et Arthur Symons – ont travaillé ensemble pendant la dernière décennie de l’ère victorienne afin de fournir aux lecteurs britanniques la traduction non expurgée de quelques chefs-d’oeuvre calomniés sinon interdits d’Émile Zola. Ces traductions allaient permettre aux lecteurs de se faire une opinion impartiale quant aux mérites littéraires de ces oeuvres. En outre, cette étude explore les motivations ayant poussé ces traducteurs à se joindre au projet clandestin de (re)traduction et tente de comprendre les effets de leur activité (re)traduisante sur leur appréciation personnelle de Zola et le roman traduit. L’article conclut que la tâche de (re)traduction a servi à élargir l’horizon culturel des traducteurs associés au projet de la Société Lutétienne, et que leurs traductions allaient, à leur tour, élargir l’horizon culturel de leurs lecteurs.
010717ar
Traduction et réception d’une auteure victorienne en France : le cas de George Eliot1
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George Eliot n’a jamais connu un grand succès en France et c’est ce problème de réception qui m’a poussée à me pencher sur les traductions françaises de son oeuvre. The Mill on the Floss, son deuxième roman, a fait l’objet de six traductions, dont trois sont étudiées dans cet article : la première par François D’Albert-Durade (1863), la deuxième par Lucienne Molitor (1957) et enfin la dernière par Alain Jumeau (2003). Il semble bien qu’un aspect de la prose éliotienne résiste à la traduction vers le français ; il s’agit de la présence de voix multiples dans le roman, dont plusieurs qui relèvent du sociolecte paysan anglais du XIXe siècle. Grâce à l’étude de la voix d’un personnage et de la voix narrative, cet article offre la confrontation des trois traductions couvrant une période d’un siècle et demi, afin de retracer le parcours traductif d’un roman victorien dans l’Hexagone.
010718ar
Les migrations linguistiques de Vladimir Nabokov
null
Les migrations linguistiques de Vladimir Nabokov sont étroitement liées à ses « migrations physiques » qui furent en premier lieu provoquées par les événements historiques de la Russie du début du XXe siècle. L’écrivain se voit contraint d’abandonner sa langue maternelle pour rejoindre les lecteurs anglophones. Ses réflexions sur la langue influencent également sa vision du traduire que nous nous proposons d’esquisser dans le présent article.
010719ar
« Stopping by the Woods » : poèmes américains classiques en yiddish
null
Cet article interprète et analyse les versions yiddish de grands poèmes américains : « The Raven » de Poe, « Hiawatha » de Longfellow, « Song of Myself » de Whitman et « Stopping by Woods on a Snowy Evening » de Frost. Les données translinguistiques sont mises en relation avec les idéologies sociales et culturelles telles que le professionnalisme poétique, l’américanisation, le socialisme, la conservation de l'identité ethnique et l'expressivité personnelle/culturelle. Somme toute, la visée première de cet article est d'« expliquer » un texte en fonction de son contexte culturel, qu’il soit américain ou juif.
010720ar
Stratégies de traduction et non-traduction1 dans The Widows de Suzette Mayr
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Dans le cadre d’une écriture féministe issue de l’immigration et de la nouvelle littérature canadienne, je me propose d’analyser les moyens linguistiques et les stratégies narratives utilisées par l’auteure albertaine Suzette Mayr, dans son roman The Widows (1998), pour traduire/transcrire le processus de négociation identitaire que subissent ses personnages d’origine allemande au Canada, et pour créer une nouvelle forme d’écriture qui puisse rendre compte de ce phénomène de rencontre des langues et des cultures. Dans ce texte, la traduction (au sens propre et métaphorique) joue un rôle fondamental et devient « un élément de dynamique textuelle », comme le souligne Sherry Simon dans Le Trafic des langues (1994). Ma propre traduction (en français) de The Widows me permettra en outre d’analyser les problèmes de traduction spécifiques soulevés par une perspective immigrante.
010721ar
Edwige Danticat : se re/trouver en traduction
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Cette étude se penche sur l’écriture de l’écrivaine haïtienne Edwige Danticat dans le cadre de l’(im)migration et de la traduction en la contrastant avec celle d’Eva Hoffman dans Lost in Translation. Les traumatismes causés par l’émigration émergent de façon différente chez ces deux auteures qui doivent négocier la nouvelle identité leur permettant de les surmonter. Hoffman se résigne à se traduire elle-même pour développer son moi américain, mais ne se remet jamais de la perte de son moi polonais. Danticat, en reconnaissant dès son arrivée à New York, qu’elle est déjà un être traduit, creuse dans le passé collectif haïtien afin de créer des personnages de fiction qui trouvent dans la traduction de leur moi la force de conjuguer deux langues et deux cultures sans nier leur passé personnel et collectif.
010722ar
Onomatopées et traduction poétique : les onomatopées allemandes dans les premières versions françaises de la Lénore de Bürger
null
Traduire les onomatopées représente un véritable défi pour le traducteur d’un texte littéraire, notamment poétique. Comment, en effet, restituer dans un texte traduit des sons codifiés qui appartiennent spécifiquement au « corps charnel » d’une autre langue ? Une équivalence est-elle possible ? À partir des options de traduction effectuées par les premiers traducteurs français de la Lénore de Bürger au XIXe siècle, on tentera de mettre au jour quelques stratégies de « reproduction en français » des onomatopées de ce célèbre poème allemand, et l’on se demandera dans quelle mesure elles ont pu trouver un écho dans l’écriture de poètes français de l’époque romantique alors en quête de renouveau.
010941ar
null
null
C’est au milieu des années 1980 que sont apparues les premières études expérimentales visant à explorer les processus psycholinguistiques à la base de l’opération de traduction. Partant d’un corpus de données, ces études ont examiné pour la première fois ce qui se passe dans la tête des traducteurs au cours de cette opération mentale particulièrement complexe. Depuis la « psycho-traductologie » s’est établie en tant que nouveau domaine de recherche spécialisé au sein de la traductologie générale. Le présent article se propose de déterminer l’objet et les principales méthodes de ce domaine de recherche en examinant quatre questions : (1) Quels sont les points de départ et les approches caractéristiques de ce domaine de recherche ? (2) Quelles sont les questions auxquelles la psycho-traductologie veut trouver des réponses ? (3) Avec quelles méthodes peut-on collecter des données pertinentes à ces questions ? (4) Avec quelles méthodes peut-on analyser et interpréter les données collectées ?
011281ar
Palestines imaginaires : La scénographie comme ethnographie
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Cet article est fondé sur la prémisse que la littérature puisse être aussi anthropologique que l’anthropologie littéraire. À travers une écriture scénographique, l’auteure pose un regard autocritique et autoréflexif sur un texte précédent, son mémoire de maîtrise en ethnomusicologie, qui portait sur la problématique identitaire dans la musique contemporaine palestinienne. L’auteure met en scène les enjeux de la recherche anthropologique dans un contexte déterritorialisé marqué par l’hybridité identitaire, la violence et le croisement de multiples imaginaires attachés à un même territoire, la Palestine.
011282ar
Déplacés : honte, corps et lieux1
null
Cet article défend l’intérêt de la honte comme objet d’étude. En effet, je prétends que la honte a simultanément des effets culturels, sociaux, psychologiques et physiologiques, effets qu’il nous faut embrasser en trouvant de nouveaux moyens de représenter l’expérience anthropologique. Mon propos emprunte à Bourdieu et à Mauss ainsi qu’à d’autres auteurs, du monde universitaire ou littéraire. Je prétends qu’il est nécessaire de raconter des histoires et de les raconter différemment si l’on veut relever les défis que pose, aux chercheurs, le phénomène de la honte.
011283ar
Voyages et fictions chez Jack Kerouac
null
S’appuyant sur la définition que Jack Kerouac a donnée de lui-même (« Je ne suis pas un “beat” mais un mystique catholique étrange, solitaire et fou... »), l’auteur lit l’immense oeuvre du « Ti-Jean » de Lowell comme si elle proposait, à travers une ethno-fiction, la mise en scène imaginaire du mythe fondateur d’un lignage Canuck, de la chronique généalogique de la migration des Kerouac, de la Bretagne aux États-Unis en passant par le Québec, et de la difficile américanisation d’une famille ouvrière, catholique et de langue française dans un des « Petits Canadas » des États-Unis. L’article démontre que l’image de « Beatnik » ne fait pas justice à l’extraordinaire créativité littéraire de cet écrivain qui a inventé un style d’écriture automatique inconnu avant lui, qui a mis en mots l’esprit de toute une époque dans un des « grands romans américains » du XXe siècle et qui a réécrit une nouvelle version de la mythologie américaine du voyage. Le monde imaginaire de Kerouac a été celui de l’exploration intérieure comme chez Walt Whitman, celui de l’excès dans l’errance, dans une descente en soi jusqu’à la folie et à la mort dans l’alcool, et enfin, celui du retour compulsif sur l’identité hybride des Franco-Américains dans une Amérique amérindienne. L’auteur montre que la légende franco-américaine des Duluoz a été, pendant quelques années, le mythe du peuple américain.
011284ar
Malcolm Reid et la traversée de la ville
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Montréal, séparée entre l’ouest anglophone et l’est anglophone, était encore dans les années 1960 une ville divisée. Malcolm Reid entreprend un voyage initiatique qui prendra la forme d’une exploration ethnologique, et dont le résultat sera un document riche d’enseignements à la fois sur la culture politique du Canada français et sur la curiosité et des anglophones francophiles. The Shouting Signpainters traduit les paroles et les écrits du groupe littéraire Parti pris. Quel genre d’équivalence est proposé? Comme plusieurs autres traducteurs du joual à l’époque, Malcolm Reid proposera une équivalence qui ne peut être que partielle entre le français et l’anglais, faisant valoir la spécificité absolue de la culture québécoise dans son rapport à la culture anglophone. Dans la ville polarisée de la Révolution tranquille, la culture émergente – où s’imbriquent langue, littérature et revendication politique – n’a pas d’équivalent ailleurs. C’est en fait le caractère intensément local et donc intraduisible de cette culture qui attire notre voyageur. Livre-culte, qui a eu un grand impact sur une certaine jeunesse anglophone pro-nationaliste au cours des années 1970, The Shouting Signpainters acquiert une nouvelle importance aujourd’hui alors que la donne culturelle est en train de se transformer à Montréal.
011285ar
Ethnographie, littérature et art dans l’oeuvre d’Anne Eisner (Putnam)
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Le présent article examine la transformation de l’ethnologie et de l’interprétation dans les travaux de l’anthropologue Colin Turnbull et de la peintre Anne Eisner (Putnam). Cette dernière, qui a vécu à la lisière de la forêt d’Ituri, dans l’ancien Congo belge (République démocratique du Congo ou RDC) durant les années 1940 et 1950, puis à nouveau en 1957-58, a transcrit deux cents légendes des Pygmées Mbuti ; l’utilisation (et, comme nous le verrons ici, la transformation) qu’a faite Colin Turnbull de certaines de ces transcriptions laisse entrevoir une vision du monde faite d’oppositions : Pygmées Mbuti-Villageois Bira, forêt-village, bonne mère-mauvaise mère. L’oeuvre d’Anne Eisner dévoile davantage des ponts et des intersections plutôt qu’elle ne polarise l’inclusion et l’exclusion soulignées par Turnbull. Les toiles d’Eisner laissent transparaître le regard nuancé que l’artiste pose sur la société d’Epulu, qui s’explique par son statut de mère parmi d’autres, de femme, d’Occidentale et de peintre. Il y va du dialogue entre l’étranger et le familier qui génère des interprétations différentes et par là brouille souvent la distinction nette entre les données observées et les transformations auxquelles donnent lieu l’écriture ou l’art.
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Anthropologie fictionnelle et anthropologie de la fiction
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La contribution à une anthropologie historique que nous proposons s’appuie sur l’utilisation de diverses sources écrites et orales et un recueil de nouvelles littéraires produites par un habitant du village de Corse du Sud objet de notre étude. Nous retraçons ainsi le processus de (re)production de la vie quotidienne en donnant accès de façon privilégiée aux représentations et aux modes de connaissance d’un acteur se faisant l’observateur de sa propre société. Ainsi s’amorce une anthropologie de la quotidienneté et de l’homme ordinaire qui permet entre autres de revisiter les rapports entre l’anthropologie et la fiction.
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Du monologue au dialogue ou de l’ambiguïté d’écrire des deux mains
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Cet article examine les attitudes contrastées du public en général et des pairs qui ont suivi la parution d’ouvrages écrits par des anthropologues professionnels pour un lectorat plus élargi : Michel Leiris, Claude Lévi-Strauss, Laura Bohannan, Nigel Barley entre autres. La mise en scène de soi-même se restreint aujourd’hui en Angleterre sous ses aspects méthodologiques et professionnels mais elle est pleinement acceptée aujourd’hui en France pour tous les publics. Cependant, de totalement interdite, elle est devenue, sous l’influence des livres de Castaneda – pourtant des faux prouvés – une des modes anthropologiques aux États-Unis sous le terme de « dialogisme ».
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L’anthropologie palestinienne entre science et politique
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Par une analyse réflexive de sa pratique de « terrain » en Palestine, l’auteure propose une réflexion épistémologique sur la nature des « terrains » anthropologiques, en particulier sur la place du subjectif dans la construction de l’objet et sa restitution. En l’occurrence, cette subjectivité s’est traduite par une implication politique de l’anthropologue, dans la mesure où la condition d’accès à un objet aussi politisé que la mémoire palestinienne impliquait des prises de position claires par rapport au conflit israélo-palestinien. Une telle implication – à la fois exigée par les acteurs palestiniens et induite par les valeurs de l’auteure – a des conséquences importantes sur la production de la connaissance scientifique, d’où la nécessité de la clarifier afin de permettre un dialogue entre des perspectives différentes et ainsi enrichir la compréhension de réalités sociales complexes et mouvantes.